Sumario: | L’importance du culte des ancêtres dans la société mésopotamienne antique est à nouveau illustrée par une lettre inédite (conservée temporairement à l’Université de Cornell, USA) en akkadien, comportant un passage en sumérien. D’après son écriture, elle date du milieu du 19e siècle av. notre ère et a été très probablement retrouvée dans une des villes du royaume de Larsa dans le sud de Sumer. Un petit-fils s’adresse à ses défunts grands-parents. Gravement malade, il demande que son cas soit jugé par eux et le dieu soleil (Šamaš). Il espère que la cause de son mal, un revenant ou un dieu (malveillant), sera déterminée. Enfin, les dieux Šamaš et Gilgameš d’en-haut et d’en-bas sont invoqués. Ce sont les juges du tribunal des morts qui décident aussi du sort des malades. Les grands-parents, représentants des ancêtres de la famille, continuent leur existence sous la forme d’esprits (eṭemmum) dans l’Au-delà et peuvent exercer ponctuellement le rôle de juges comme ils le faisaient peut-être déjà dans leur cité de leur vivant. Si la démarche qui consiste à faire appel à eux n’est pas sans parallèle dans la littérature babylonienne, l’usage d’une lettre comme moyen de communication était en revanche inconnu jusqu’à présent. Le fait est d’autant plus remarquable que la tablette en question avait été à l’origine recouverte d’une enveloppe scellée. Faute de contexte, le statut d’un tel texte est difficile à définir même si par son contenu il se rapproche des lettres aux dieux, volontiers classées comme littéraires voire scolaires. Fictif ou non, il est certain que le nouveau document permet d’entrevoir la conception de l’Au-delà par les habitants du sud de la Mésopotamie à un moment déterminé de l’Histoire. Cette vision est moins pessimiste et lugubre que celle donnée dans la littérature classique: les ancêtres peuvent penser, juger, siéger auprès du dieu Soleil et recevoir du courrier de leurs proches.
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